Dans une nouvelle entrevue pour le balado JJO Discover New Music, le chanteur de KILLSWITCH ENGAGE, Jesse Leach, a parlé du plus récent album du groupe, This Consequence, sorti le 21 février via Metal Blade. Il s’agit du neuvième album de la formation, et du sixième avec Leach, qui est revenu dans le groupe en 2012.
Lorsqu’on lui a demandé pourquoi c’était le bon moment pour lancer un nouveau disque, Jesse a répondu :
« Je pense que le moment est parfait. Le monde est dans un état où la musique extrême, la musique métal, a vraiment sa place. Il y a beaucoup de gens frustrés et anxieux, et ce genre musical est thérapeutique. Donc, pour moi, c’est idéal. La longue attente est aussi due au travail acharné sur le disque, mais la pandémie nous a aussi vidés. C’était une période peu créative pour nous tous. Et au final, ça s’est simplement aligné pour qu’il sorte à un moment qui, selon moi, est parfait. »
En revenant sur la façon dont la pandémie a affecté sa créativité, Jesse explique :
« On venait tout juste de sortir Atonement [2019], et trois jours après le début de la tournée, tout s’est arrêté… Quand tu mets autant d’efforts dans un projet créatif et qu’il ne se passe rien — j’avais plus de créativité, j’avais tout mis dans cet album. Et dans ma tête, c’était : « OK, maintenant on part en tournée. » Donc quand la pandémie a frappé, au début, je me suis dit : « Ah, une pause bien méritée, c’est fou, on n’en a pas eu depuis longtemps. » Et ensuite, c’est devenu : « Est-ce qu’on va pouvoir refaire ça un jour ? » Pour moi, ça a été un moment de réflexion, d’introspection. La musique a pris le bord un peu. Je me suis demandé : « Qui suis-je sans ce groupe ? » C’était une grosse question. Mais en ressortant de cette période, avec toutes les pensées qui me hantaient, cet album m’a aidé à digérer tout ça. Il m’a permis de filtrer mes frustrations et ma colère. Et pour moi, c’est ça que devraient être la musique métal et le hardcore : une thérapie. »
À propos des défis liés à l’inspiration pour écrire les chansons de This Consequence, Jesse admet :
« Oui, j’ai eu l’impression de perdre des couches de mon âme. Je sentais que je n’avais pas encore trouvé ma voix. On a fini par jeter six ou sept de mes maquettes. Je crois que je devais juste reconnecter avec la frustration dont je parle sans cesse. Je pense que je l’avais beaucoup refoulée. Et je suis sûr qu’on est nombreux à avoir eu des pensées bizarres pendant la pandémie. Pour moi, c’était une redécouverte du pourquoi j’ai commencé tout ça. Je voulais être la voix des sans-voix. Parler des problèmes du monde. Tout mettre sur la table. Mais au début de l’album, je ne savais pas quoi dire. J’étais encore engourdi. Mais à travers le processus, j’ai retrouvé cet esprit révolutionnaire, ce désir de secouer les choses, de faire réfléchir les gens, de livrer un message porteur. »
KILLSWITCH ENGAGE a lancé sa première tournée nord-américaine depuis la fin 2022 le 5 mars à Nashville, Tennessee. Cette tournée, avec KUBLAI KHAN TX, FIT FOR A KING et FROZEN SOUL, se poursuivra jusqu’au 12 avril à Portland, Maine.
Dans une autre entrevue avec United Rock Nations, Jesse a abordé le plus grand défi derrière This Consequence :
« Pour moi, c’était de rester — et je dis ce mot avec prudence — pertinent. Pertinent pour moi et pour les gars du groupe. Je voulais que mes paroles les excitent, mais je voulais aussi qu’elles soient vraies. Je devais pouvoir lire mes textes et me dire : « Oui. C’est exactement ça que je veux dire. » J’ai passé à travers sept ou huit chansons à lancer des idées en l’air, en espérant que ça colle. Et les gars m’ont dit : « On ne sent pas que tu donnes ton meilleur. » Ce rejet a été difficile. Je suis devenu insécure. Je doutais de moi. Mais ça m’a poussé à aller plus loin, à me redécouvrir comme auteur. À puiser ailleurs. Avec tout ce qu’on a traversé, il y avait tellement de matière. J’ai puisé dans ce que je voyais dans les médias, dans les histoires de gens autour de moi, des relations abusives… Je les ai transformées en récits, à ma façon, mais avec un angle plus large. Ce n’était plus juste ‘je, moi, je’. C’était ‘nous’. D’où le titre This Consequence. Ça parle de nous — tous. Comment réagis-tu à ces situations ? Comment ajustes-tu ton comportement ? Qu’as-tu appris ? Tout ce qu’on fait entraîne une conséquence. »
« Je me suis concentré sur le grand tableau. Comment guérir notre stress post-traumatique collectif ? On est encore là-dedans, même si on ne s’en rend pas compte. Et comment les influences extérieures nous manipulent et nous divisent ? Le défi, c’était : comment transmettre ce message ? J’ai fait de mon mieux. Et je pense avoir très bien réussi. »
Lorsqu’on lui demande si écrire sur tous ces sujets a été une forme de thérapie, Leach répond :
« Oui, absolument. Et c’est nécessaire. Tu ne peux pas éviter ça. Et je crois que j’ai beaucoup fui ça pendant la pandémie. Je ne voulais rien savoir. C’était trop intense. Mais là, on en redescend, et les gens sont plus ouverts à des discussions. Peut-être que ta vision n’était pas 100 % juste. Peut-être que tu peux apprendre de ça. Et comment avancer sans faire de tes certitudes des vérités absolues ? C’est important. Et en tant qu’auteur, comment écrire pour que l’auditeur tire ses propres conclusions ? Je ne veux pas donner une réponse. Je veux te faire réfléchir. Et toi, tu réponds à ta manière. C’est ça que j’ai essayé de faire — écrire avec assez de marge pour que la chanson t’appartienne. J’ai écrit les paroles, mais je veux que ce soit toi qui prennes le flambeau. »
Jesse a aussi discuté de la nature sombre, fâchée et agressive de This Consequence avec Joshua Toomey du balado Talk Toomey :
« Oui, je pense que la colère, l’agressivité et la noirceur — pour le meilleur ou pour le pire — c’est exactement ce dont le monde a besoin en ce moment, d’un point de vue thérapeutique. On est nombreux à ressentir de la frustration, de la trahison. C’est ce que j’ai mis de l’avant dans mes textes. Mais si tu lis vraiment entre les lignes, tu verras une forme de positivité qui vient d’une colère juste. Une colère qui veut réveiller les gens, les faire réfléchir, leur faire choisir leur propre voie, plutôt que de suivre aveuglément les autres — comme c’est souvent le cas avec les gouvernements, les religions organisées, tout ce qui nous contrôle. C’est une invitation à sortir de la matrice, à tracer sa propre route. Et sous toute cette colère, il y a une lueur d’espoir. Le métal permet de parler de choses sombres, mais de façon libératrice. C’est pour ça qu’on aime ça. »
Enfin, Jesse a abordé son évolution comme chanteur depuis Atonement :
« Pour être honnête, This Consequence a été très difficile à écrire. J’ai dû retrouver l’inspiration. Et même au niveau vocal, j’ai appris de nouvelles techniques comme le vocal fry, et j’ai tenté de les intégrer à mon style tout en restant fidèle à moi-même. C’était un processus long et ardu.
Après ma chirurgie vocale en 2018, j’ai réappris à parler différemment. Je suis plus mesuré maintenant. Je place ma voix au bon endroit. Et ça s’est répercuté sur mon chant. Je me suis concentré sur le chant, d’abord, pour rester juste. Ensuite, mes cris… j’étais parano. Trois shows de suite, au quatrième, je sentais l’enflure. Alors j’ai étudié le fry scream, parce que tu peux faire plein de trucs intéressants sans trop abîmer ta voix. Mais avec ma voix, il manquait quelque chose dans les graves, dans mes cris habituels. Donc en studio, j’ai tenté de sauver ma voix avec cette technique, mais ça tombait à plat. Pour les parties aiguës, ça allait. Mais pour les graves et les growls death metal, c’est l’ancienne école… celle des années 80 et 90. Alors j’ai appris, avec beaucoup d’essais et erreurs, à mélanger les deux styles. Je peux maintenant faire mes trucs old school et y intégrer du fry pour atteindre des aigus fous sans détruire ma voix. »
Entrevue :
Transcription de l’entrevue par Blabbermouth