Dernièrement, notre journaliste Marc Desgagné, MetalUniverse.net, a réalisé une entrevue avec la formation rock franco de Québec CARAVANE. Nous discutons de plusieurs sujets, dont la sortie de leur plus récent album « IV » le 26 avril 2024 sur Rosemarie Records. Touchant une multitudes d’influences rock; du classic rock, au progressif, au new rock et même une atmosphère planante fortement 70-80s, CARAVANE nous propose 10 nouvelles chansons rock en français sur ce nouvel opus.
MU: Tout d’abord, félicitations pour la sortie de votre nouvel album « IV »! Pour ceux qui connaissent moins Caravane et votre univers musical, pouvez-vous nous décrire brièvement le parcours du groupe et ses principales influences?
Caravane: Caravane est né en 2013 après qu’on ait passé plusieurs années à parcourir les routes du Canada, des États-Unis et de l’Europe avec la formation punk The Hunters, notre band du secondaire. On avait envie d’essayer de chanter en français et à l’époque on était tombé en amour avec le rock blues des Black Keys et des White Stripes. Après la sortie de Chien noir en 2014, on s’est mis à plein temps dans Caravane et The Hunters a pris un peu le second plan. On s’est mis à tourner le plus possible au Québec. On a sorti un 2e album en 2016, Fuego, avec une optique un peu plus Pop Rock, grandement influencé par le mood nocturne d’AM d’Arctic Monkeys et une attitude à la The Strokes. On a ensuite exporté notre musique jusqu’en Asie tout en continuant de faire plusieurs spectacles aux quatre coins de la province. Un 3e album, Supernova, a vu le jour en 2018 et sur celui-ci, on a voulu prendre de nouveaux risques au niveau de l’exploration sonore. C’est l’album dans lequel on a essayé un peu d’exploser les codes et ça tire plus dans tous les sens au niveau des influences: Tame Impala, The War on Drugs, Pearl Jam, Pink Floyd, Black Sabbath, etc. Après une grosse tournée pour promouvoir cet album, on s’est retrouvé en pandémie et on a pu prendre un pas de recul pour mieux revenir en force avec un 4e album 100% assumé.
MU: Comment la pandémie de COVID-19 a-t-elle influencé le son et les thèmes abordés six ans après la sortie de votre album précédent Supernova? Aviez-vous déjà commencé à travailler sur de nouvelles chansons?
Caravane: Comme c’était notre habitude, on avait commencé à travailler sur un 4e album très rapidement après la sortie de Supernova. Dès le début 2019, on s’était mis dans la composition d’une sorte de suite à cet album, c’est-à-dire qu’on avait un large bassin d’influences et on essayait plein d’affaires. La pandémie est arrivée et nous a forcé à prendre un gros pas de recul. Il y a eu du mouvement aussi dans le lineup du band et on a fini par jeter toutes les chansons qu’on avait jusque là aux poubelles. S’en ait ensuivi une période d’incertitude où on ne savait pas trop si un 4e album allait voir le jour finalement. C’est par une chaude journée d’été que Dominic et moi, on s’est réunit pour essayer de trouver un genre de filon qui allait nous motiver à faire un nouvel album. On s’est dit que ce serait bien finalement de faire un retour aux sources, d’aller dans le gros Rock assumé. À ce point-là, nos influences diverses pouvaient être canalisées dans d’autres projets connexes: New Bleach (un duo pop-électro que Dominic et moi on a sorti en 2021) ainsi que Bønanza, le projet solo de Dominic. Le champ était donc libre pour retourner à nos racines Rock avec Caravane.
MU: Il y a eu de nombreuses embûches de 2019 à 2024 avec les changements de membres et la sortie de l’album. Comment êtes-vous parvenu à retrouver cette passion/motivation malgré tout?
Caravane: Lors de cette fameuse journée d’été citée ci-haut, on s’est mis des bons vieux classiques indémodables dans l’fond (AC/DC, Led Zeppelin et autres) et on essayait de trouver l’angle par lequel on pourrait aborder les codes un peu surfait du Rock sans que ça sonne trop déjà vu. On s’est dit qu’il faudrait y aller sans se prendre trop au sérieux parce que le Rock c’est ça finalement. C’est un excellent canalisateur d’énergie brute et de plaisir. On s’est mis à penser au concept de la Metal Zone, un genre d’espace qui accompagne tout bon show Rock où on voit des pères et des mères de famille, bien sérieux au quotidien, qui se font du fun solide comme s’il n’y avait pas de lendemain. C’est avec ça en tête qu’on a abordé la composition musicale de l’album pis c’est ça, on s’est fait du fun en masse à revisiter plein de trucs surfaits, mais à notre sauce.
MU: Quelles sont les principales thématiques explorées dans « IV » et comment elles se manifestent à travers les paroles et la musique?
Caravane: L’autre partie du puzzle c’était justement de trouver ce qu’on voulait dire sur ces grosses tounes de Rock là. Oui, on voulait offrir une sorte de retour aux sources, mais comme on est rendu des trentenaires, notre vie a beaucoup changée depuis nos débuts dans la jeune vingtaine. Ça faisait plus trop de sens d’abordé les mêmes thèmes alors on a décidé d’injecter à notre écriture une bonne dose d’humour noire et de cynisme. On avait des frustrations à canaliser par rapport au métier d’artiste et face à l’industrie et à la société en général. C’est sûr que c’était teinté par l’expérience de la pandémie, mais on a essayé justement de ne pas seulement être en mode « chialage », on voulait que ça reste assez ludique.
MU: Les lignes « J’l’ai vu aux nouvelles, la mort ça vaut d’l’or. Si j’suis honnête, j’t’un ostie d’menteur » sont très évocatrices. Pouvez-vous nous expliquer le contexte derrière ces paroles?
Caravane: La chanson « Faire plaisir aux cons » c’est une idée qui a germé en écoutant du rap conscient. J’aimais beaucoup la liberté que les rappeurs ont de parler d’énormément de sujets en même temps à cause du nombre de paroles qu’il peut y avoir dans une chanson versus nous avec le Rock où on doit condensé une idée dans très peu de mots pour que ça demeure catchy et tout. Bref, on a essayé l’exercice de juste se défouler dans un texte sans se soucier de la longueur ou rien et on s’est dit qu’on construirait la chanson par la suite, à partir du texte. Ça a donné un exercice un peu similaire à Rage Against the Machine je crois, sans prétention bien sûr haha. Cette ligne là en particulier évoque un peu le climat dans lequel on se trouve depuis 2020. Ça parle d’images de guerre et de violence qui ponctuent les téléjournaux sans cesse. Ça parle également de cette part de responsabilité en chacun de nous car on est à la fois rebuté et fasciné par le morbide et le négatif. Les lignes qui suivent: « J’ai été vaincu par la peur et la haine que j’ai cru, par la raison que j’ai tue » viennent renforcir cette idée qu’on est tous à la fois victime et perprétateur de ce climat de violence et d’instabilité.
MU: A quel point l’utilisation de la langue française est-elle importante pour Caravane? Est-ce un défi pour vous en tant qu’artiste?
Caravane: C’est la pierre angulaire même de la création du band alors c’est sûr que c’est hyper important. On essaie toujours de mettre notre langue de l’avant. Je pense que c’est une langue magnifique avec laquelle s’exprimer et c’est toujours un défi d’en faire de bonnes chansons Rock alors c’est grisant.
MU: Parlant de défi, quel a été le plus grand que vous avez rencontré lors de la création de cet album?
Caravane: Je diras de marcher la fine ligne entre y aller à fond dans le Rock et tout et ne pas sombrer dans devenir une sortie de parodie un peu ridicule. Tsé, il n’y a qu’un AC/DC, ça sert à rien d’être une espèce de pâle copie de ça. Il fallait trouver la manière de faire des gros riffs, des solos et tout, mais aussi d’avoir quelque chose à dire de plus que « Rock ‘n’ Roll!!! ».
MU: Comment l’artiste hip-hop Webster a-t-il contribué à « IV » et quel impact cela a-t-il eu sur votre travail? Comment cette collaboration a-t-elle débutée?
Caravane: Webster est un ami à nous de longue date. Ça faisait un petit bout qu’on voulait intégrer une rappeur dans une chanson et quand le projet de « Faire plaisir aux cons » est arrivé, c’était un fit naturel. On avait envie aussi de donner la parole, pour une chanson aussi incisive, à une voix forte de la communauté racisé qui pouvait amener une angle différent du notre.
MU: Comment décririez-vous l’évolution de votre son depuis votre dernier album jusqu’à « IV »?
Caravane: Je pense que « Supernova », c’était un peu Caravane qui ne s’assume plus d’être un simple band qui Rock. On voulait plus, on cherchait une certaine crédibilité au niveau de notre art et tout alors que sur « IV », le moteur principal était vraiment plus simple. C’était le fun pur et dur de faire des bonnes chansons efficaces.
MU: Entre la planante chanson rock « Faire plaisir aux cons » et « Rolling Stone », qui contient des sonorités plus vintage classic rock – spécialement aux guitares, à quel point est-ce essentiel pour vous de toucher d’explorer autant d’approches musicales différentes?
Caravane: C’est un peu inconscient je dirais. Ça vient d’une certaine envie de ne pas toujours refaire la même chose j’imagine. Quand on a fait cet album-là, on écoutait pleins de classiques du genre et on essayait de s’en inspirer alors ça pouvait passer de ZZ Top aux Rolling Stones à Rage Against the Machine. On voulait vraiment rendre hommage à tous ces géants du Rock qui ont façonné notre adolescence.
MU: Le début de « Prêts à perdre leurs blondes pour le Rock » fait vraiment penser au son d’un groupe comme Jet. Est-ce qu’il y a des groupes actuels qui vous influencent ou vous revenez souvent à vos anciens amours musicaux?
Caravane: C’est un peu comme j’énumérais à la question précédente. Pour cet album, on a moins puisé dans le moderne et plus dans la nostalgie je dirais. Mais le Rock a une longue histoire riche de bands incroyables alors c’était pas trop dur de trouver des influences.
MU: Quels sont vos projets immédiats après la sortie de cet album? Envisagez-vous une tournée ou d’autres projets musicaux?
Caravane: Pour l’instant c’est vraiment de partir présenter cet album là sur la route. C’est un plaisir d’enfin pouvoir jouer devant des gens, on se dit souvent que le Rock c’est un partage avec la crowd. On peut pas vraiment « rocker » seul dans le salon haha. Sinon, Dominic travaille également sur un 2e album de Bønanza qui devrait voir le jour d’ici quelques mois.
MU: Comment envisagez-vous l’impact de « IV » sur la trajectoire future de Caravane en tant que groupe?
Caravane: On voulait revenir en force et je pense que c’est assez réussi en toute humilité. Après 5 ans, c’était juste de dire un : « Hello! On est encore là! »
MU: Pouvez-vous nous parler de l’importance pour vous d’utiliser le français dans vos paroles et comment cela contribue à votre identité musicale?
Caravane: Le français est selon moi, une des plus belles langues qui existent. Je trouve qu’elle a souvent mauvaise presse à cause de toutes les règles et les exceptions et tout, mais pour moi c’est une privilège d’avoir été élevé en français dans une Amérique anglophone. Je trouve que ça donne un petit edge au Québec qui n’existe pas ailleurs et ça rend vraiment notre culture beaucoup plus unique. Je pense que de faire de la musique en français, ça reste un peu un acte politique et on est bien fier de faire.
MU: Merci d’avoir pris le temps de répondre à ces questions et si vous avez un dernier message pour nos lecteurs, c’est votre tour!
Caravane: Merci à vous! Chers lecteurs, si jamais il vous prend l’envie d’écouter l’album « IV », sachez qu’il est important d’écouter cet album dans l’esprit de la Metal Zone. Un espace intangible où tout est permis (ou presque), où le mot d’ordre est de s’amuser. Ici, pas de boss, pas d’horaire, juste vous et la musique. Laissez votre petit côté motté rejaillir en vous et que vous choisissiez de vous éclater une bière sur la tête ou de vous couler un bain chaud, faites-le à votre façon.
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Liste des pièces « IV »:
- Kaléidoscope 02:08
- Génies 02:52
- Wô Menute 02:26
- J’cherche le trouble 02:48
- Juste une toune 03:11
- Faire plaisir aux cons (feat. Webster) 04:18
- « Prêts à perdre leurs blondes pour le Rock » 02:32
- SMPW 02:49
- Metal Zone 02:34
- Rolling Stone 03:05