Mononc’ Serge & Anonymus – Métal canadien-français (2024)

C’est sorti comme une surprise, une bombe sur le paysage metal du Québec. Ce 6 novembre marque la troisième collaboration entre l’inimitable Mononc’ Serge et le groupe de thrash metal Anonymus, le tout immortalisé sur un microsillon. Le disque s’appelle Metal canadien-français et a été annoncé assez tardivement pour le plus grand plaisir des fans qui ne s’attendaient pas forcément à un nouvel opus, juste à temps pour le temps des Fêtes !

Pas besoin de présentation. Mononc’ Serge, ancien bassiste/contrebassiste des Colocs, roule sa bosse en solo depuis 1997 avec onze albums à son actif. De son côté, le groupe Anonymus, que je considère un peu comme les Slayer de la Belle Province, a vu le jour en 1989 et est bien établi sur la scène metal québécoise avec neuf disques à son actif. Le curé de la rime thrash et les quatre sauvageons associent leurs forces pour le plus grand plaisir des chevelus aux vestes patchées des quatre coins du Québec.

La collaboration a commencé en 2001 à l’occasion de l’ancien festival Polliwog lorsqu’Anonymus a rejoint Mononc’ Serge sur scène pour faire une version metal de la chanson Maijuana. Cela a tellement pogné qu’une idée de collaboration était une suite logique. En 2003, le fruit de cette belle complicité musicale se concrétise avec la sortie de L’académie du massacre, qui, à l’heure actuelle, est considéré comme un classique indéniable du metal d’ici. Ce dernier a totalisé plus de 30 000 disques vendus, ce qui représente le plus gros succès commercial des deux carrières. Il contient des relectures de morceaux de Mononc’ Serge ainsi que quelques compositions comme L’âge de bière que j’ai découvert en Belgique grâce aux débuts d’internet dans ma préadolescence. On retrouve deux autres titres exclusifs : La chute du dollar et Les portes de l’enfer. En 2008, le deuxième album Musique barbare est publié et, contrairement à son prédécesseur, il ne contient uniquement que des nouvelles compositions.

C’est pour les 20 ans de L’académie du massacre, l’an dernier, que les musiciens refont une tournée ensemble, et c’est dans cette période-là qu’ils décident d’entrer en studio pour nous pondre leur troisième effort. À l’époque, ils en ont même profité pour écrire une toune ensemble : Redoubler, avec la participation de Marco Calliari. Il y a un mois, le groupe partage sur YouTube une vidéo annonçant leur grand retour, presque 16 ans depuis leur dernier disque, avec un nouvel enregistrement accompagné d’une tournée!

Il y a énormément de clins d’œil et de références sur le disque : Motley Crüe, Dio, Megadeth, Anthrax, Guns N’ Roses ou encore La Bolduc, La Poune ou Harmonium.

Voici mon analyse de Metal canadien-français toune par toune :

1. La ligue du vieux pouèl : bel hommage aux vieux metalleux. De nombreux clins d’œil sont présents : Megadeth, Anthrax (avec un riff du morceau Indians), Motley Crüe (avec un passage très « catchy »). Les paroles sont succulentes avec des jeux de mots faciles mais efficaces. Musicalement, on retrouve l’alchimie des deux albums précédents. Belle entrée en la matière !
   « Quand t’es vieux pis qu’tu fais du metal, t’essayes d’avoir l’air méchant mais t’as juste l’air cave » est répété jusqu’à la fin de la pièce.
2. Metal canadien-français : sorti il y a deux semaines comme seul et unique simple du disque, le vidéoclip est drôlement écœurant. Avec beaucoup de références à la culture populaire québécoise et au style de vie d’un metalleux. Le riff de guitare principal se marie parfaitement avec les paroles de Serge. J’aime beaucoup le solo de guitare pour cette pièce qui fait du bien aux oreilles et aux zygomatiques. Vive le metal canadien-français ! Cette pièce va devenir un classique du genre et un hymne pour la scène métallique d’ici… ou pas !
3. La bataille du Vendredi Saint : hommage à ce qui est un des plus gros événements du hockey de la LNH de l’époque. La rencontre entre le Canadien de Montréal et les Nordiques de Québec a eu lieu le 20 avril 1984 au Forum de Montréal. Ce soir-là, sur la glace, ça a brassé sur un solide temps avec notamment deux batailles épiques. Serge se fait plaisir avec un chant varié où il pousse une gueulante qui sonne comme un défouloir. La double pédale y est jouissive.
4. Moé mais en mieux : titre qui fait référence à l’usage de la cocaïne qui parfois peut nous faire sentir comme un surhomme ou un super-héros. Comme une version améliorée de nous-même.
   « Moi la magie que j’aime elle vient dans un p’tit sac. C’est une magie blanche qui fait qu’après ma dose, j’ai beau être poche je me sens comme un virtuose ».
5. La guerre de la technologie : un de mes titres préférés du disque ! Il y a un solo d’inspiration heavy/power metal qui a des sonorités Iron Maiden très efficaces !
6. Hommage aux hommages : « Ceci est un hommage à tous les bands hommage ». Beaucoup de « name dropping », et un clin d’œil à Guns N’ Roses avec le riff de guitare de Sweet Child O’ Mine.
7. Shitty accent : dédramatisation pour les gens qui ont un accent haché au couteau quand ils parlent la langue de Shakespeare !
8. Tuer du monde : pièce la plus « second degré » possible ! « Tuer du monde c’est l’fun » scande Oscar Souto.
   « J’fais de la comptabilité, toute la journée je brasse des chiffres, laisse-moi t’dire que j’ai hâte de tuer quand arrive la fin de mon shift. J’ai hâte de tuer des passants. J’ai hâte de tuer des polices ».
   Clin d’œil à Star Wars avec ce riff intergalactique à 1:23.
9. J’parle vrai : Musicalement, ça bûche bien et Mononc’ nous prouve qu’il est encore capable de rocker pas pire ! Vocabulaire fleuri au programme.
10. S’a coche : ode à la vie des musiciens passionnés comme nos cinq poilus.
    « Des fois on va jouer en Europe. J’peux t’dire qu’là-bas y’en fument des clopes ! Y’en callent de la bière, y’en boivent du vin, y’en font de la poudre, y’en roulent des joints. Une fois j’ai voulu un petit remontant, ils m’ont apporté un miroir blanc. J’ai tout sniffé, qu’est-ce tu penses et puis j’ai crié VIVE LA FRANCE ».
    « Des bouteilles pour le Roi Soleil. Des canettes pour Marie-Antoinette ! ».
11. Biloubiloubilou : le refrain un peu niaiseux fait d’étranges sons de bouche va te rester pogné en tête pendant un p’tit boutte !
12. Bonne année : dans le même calibre que Les fêtes en enfer. On termine le disque sur des airs festifs.

Bref…
Encore une belle collaboration, la puissance du metal d’Anonymus avec le cynisme et le second degré thrash de Mononc’ Serge, j’adore et j’adhère !

J’ai hâte de voir ces nouveaux morceaux en spectacle. Je serai au show à l’Impérial Bell de Québec le 30 décembre, avec Tagada Jones en première partie. J’ai vu trois fois Mononc’ Serge, une fois Anonymus mais jamais les deux ensemble. Je suis pas mal énervé ! J’en profiterai pour rédiger une chronique disponible ici.

Allez acheter le CD ou le vinyle et des billets pour les dates où il en reste ! J’en profite également pour dire que l’album Stress d’Anonymus a subi un lifting pour une version 2024 remastérisée par Jef Fortin pour le 35e anniversaire du disque.

▶Pour commander:  mononc.com/boutique ou boutique.boiteamusique.ca/

Playlist YouTube:

https://mononc.com/metal-canadien-francais