PAR EDOUARD DUBUISSON
Fuudge avec deux « U », retenez bien le nom de cette formation montréalaise qui se fait un nom sur la scène psychédélique de la Belle Province depuis quelques années. La preuve en est, avec la sortie de leur troisième album « …qu’un cauchemar devienne si vrai ». Simple et (crissement) efficace. « Rock lourd, francophone, inspiré du grunge, du stoner, du noise et de la musique psychédélique. Entre autres ». C’est comme ça qu’ils décrivent leur univers musical sur leurs réseaux sociaux et c’est exactement dans ce registre là qu’on se plonge lors de l’écoute de ce petit bijou auditif.
Le groupe
De gauche à droite : Pierre Alexandre, Olivier Laroche, Vincent LaBoissonnière et David Bujold
Fuudge a vu le jour en 2016 à Montréal et ce projet est articulé autour du parolier et multi-instrumentaliste David Bujold. Les deux premiers EP, « EP » et « Man! » où les inspirations de Pink Floyd se font ressentir, sortent successivement en 2016 et 2017 sous ce merveilleux format qu’est le vinyle.
« Les Matricides », le premier album complet, est publié en 2018 et exploite les sonorités plus stoner, avec le côté lourd et fuzzé qui est la marque de fabrique du quatuor. Fruit-Dieu, leur deuxième opus qui sort quant à lui en 2020, a surpris tout le monde avec son côté plus mélodique, mais toujours dans l’esprit psychédélique, avec des inspirations typiquement années soixante-dix.
Grunge, stoner, rock psychédélique, noise rock, punk… autant de styles musicaux que David s’amuse à sublimer avec son génie créatif sans fin. En effet, il joue la majorité des instruments sur les enregistrements mais est accompagné des mêmes musiciens depuis 2016, à savoir : Pierre Alexandre, Olivier Laroche et Vincent Laboissonnière. Le tout dans la langue de Richard Desjardins. Oui, monsieur !
L’album
« …qu’un vrai cauchemar devienne si vrai » est sorti le 19 mai 2023 sur le label Folivora Records. Contrairement à ses deux prédecesseurs, enregistrés dans la chambre de l’appartement de David, il a été confectionné dans les studios de Ben Bouchard (Galaxie, Les Hay Babies, Dany Placard). Le mastering a été confié à Marc-Olivier Germain pour le Lab Mastering et le mixage par Ryan Battistuzzi. Avec toujours David comme chef d’orchestre et tête pensante de ce merveilleux projet, bien évidemment.
L’album comporte des riffs de guitare stoner assez lourds et un côté grunge qui va vous rappeller des morceaux de Nirvana.
David a dit lors d’une entrevue dans un journal bien connu de Québec que cet album était comme une auto thérapie par rapport à l’anxiété qui est de plus en plus présente dans notre société, surtout depuis la fameuse pandémie. Le fait de crier sur pas mal de morceaux a été libérateur pour lui. Et ses cris sont tellement communicatifs et furieusement efficaces, que l’auditeur embarque directement dans l’expérience proposée sur cette délicieuse galette.
Les thème abordés sont donc l’anxiété, la fragilité de la vie, la destruction et les sensations intenses. Des défis émotionnels auxquels nous devons faire face, à un moment donné, dans nos vies quotidiennes.
Pochette réalisée par David Bujold (voir en haut de la page)
Le radar analytique et intense d’Eddy
1. Jusque dans la tombe : la pièce commence avec un bourdonnement et des effets électroniques psychés avant de tomber dans le coeur du sujet : une guitare fuzzée à bloc qui va régaler les amateurs du genre. Les paroles traitent de la confiance en soi et de l’image qu’on a de soi dans un miroir.
2. Ta yeule, toute va ben : cette phrase pourrait être mon leitmotiv. En effet, nous sommes amenés à nous rendre compte que nous chialons la bouche pleine et que la tendance à être pessimistes peut facilement prendre le dessus sur nos émotions. Nous sommes des privilégiés et il y a toujours pire que nous. Ne jamais l’oublier ! Kurt aurait trippé de voir que son héritage musical aurait inspiré des chansons en français. Le cri est un défouloir sans limite qui prend ici tout son sens.
3. J’aimerais ben ça aimer ça (mais j’aime pas ça) : une des meilleures compositions de l’album. Instantanément sa mélodie nous reste pognée dans la tête. Je comprends les paroles comme étant une ôde à l’hypocrysie et au fait que c’est pas parce que tout le monde aime quelque chose que, forcément, nous sommes obligés de faire comme tout le monde pour rentrer dans le moule des goûts populaires. Et du politiquement correct au final. Cette pièce est fascinante et elle fait énormément de bien aux oreilles et à l’âme. Le vidéoclip avec les gros plans et les sourires malaisants des musiciens est à voir absolument. Un chef d’oeuvre absolu.
4. On aime les Saints : véritable coup de coeur pour le vidéoclip. Le visuel est hallucinant ; sale et malaisant à souhait ! La composition la plus lourde de l’album, à écouter à s’éclater les tympas tellement c’est bon. Le titre est bien sur un clin d’oeil à l’omniprésence et le pouvoir de l’Eglise dans la société québecoise. Jadis !
5. …qu’un cauchemar devienne si vrai : le chant céleste et envoûtant est l’introduction parfaite à ce qui suit : du stoner gras et divinement rythmé. Une mention particulière pour la batterie et les roulements de tome parfaitement exécutés avec la montée en puissance jouissive qui nous mène jusqu’au solo de guitare qui pourrait faire palir les membres du Big Four.
6. T’arracher l’coeur : balade mélancolique avec ambiance planante au menu.
7. Sans fermer les yeux : rock mélodique et musclé avec un court solo de guitare endiablé. La voix de David colle parfaitement avec ce genre de compositions courtes et intenses.
8. Heureux sont les niais : ambiance grunge et noise rock avec un chant très agressif. David vomit sa haine et ses trippes ! « Je veux plus jamais rien savoir » est dans ma tête depuis plusieurs jours! Le solo de guitare est dans la veine d’un bon vieux Kyuss ou Queens Of The Stone Age. La batterie est sauvagement garage rock.
9. Pardon mononc’ : grunge années 90 où la section rythmique est succulente et où le côté pesant prend de plus en plus d’ampleur au fur et à mesure que la toune évolue. Une belle envolée dans les derniers instants avec les effets de claviers aériens.
10. Pas besoin d’un assasin : plus courte composition du disque : brutale et sauvage : ça part dans tous les sens et c’est réussi!
11. Efface ta mort : une touche de rock folklorique avec la flûte s’ajoute à une bonne dose de fuzz pour ce dernier morceau toujours dans la grosse qualité!
Les informations inutiles d’Eddy
-Les membres de Fuudge viennent des quatre coins de la province : David est originaire de Montréal, Olivier de Québec, P-A de Saint-Jean-Sur-Richelieu et Vincent de Gaspé.
-J’ai eu la chance d’aller les voir au Festival d’été de Québec le semaine passée. Le son, la mise en scène et le choix des morceaux… Ils ont livré un spectacle exceptionnel sur la scène Loto Québec située au Parc de la Francophonie. Un grand moment qui m’a fait apprécié le groupe encore plus qu’avant car c’était la première fois que j’assistais à une de leurs prestations.
-Un enregistrement filmé à la salle L’Anti Bar en novembre 2019 est disponible sur Youtube :
-J’ai acheté le vinyle en version limitée or chez mon disquaire local, le Knockout. Si vous voulez vous le procurer c’est soit sur le Bandcamp du groupe, soit lors de spectacles ou encore en ligne chez pas mal de disquaires québécois ! Supportez cette belle scène locale talentueuse.
Bref…
Fuddge a sorti selon moi son meilleur album. Les différents styles sont abilement maitrisés et on passe un agréable moment. Étant un anxieux dans la vie, je me suis identifié à pas mal d’émotions et les textes m’ont transcendé. Bravo. On en redemande!
-Style : Stoner/Grunge/Rock Franco/Noise Rock
-Label : Folivora Records
-Pour fans de : stoner, grunge, garage rock, noise rock, Nirvana, toutes les offrandes à saveur de gros fuzz,…
https://www.facebook.com/fuudgeband/
https://fuudge.bandcamp.com/
https://www.instagram.com/fuudgeband/