Spectacle: Le 5 avril 2024 au CEM de Chicoutimi
Organisateur: CEM
Compte-rendu: Mathieu Girard
Photographe / Vidéos: Mathieu Girard
Soirée éclectique, il est rare d’assister à un concert métal assis… Mais l’expérience en vaudra la peine, nous ne sommes pas ici pour faire du crowd surfing, mais plutôt subir un Wall of Voices, alors que 13 puissantes voix de la communauté métallique montréalaise s’unissent pour nous faire vivre ce que serait la messe de minuit en enfer… place au Growlers Choir!
Sullen Earth
Le fondateur et chef d’orchestre du Choir, Pierre-Luc Sénécal, nous présente son projet solo, Sullen Earth. Nous avons en effet, et en primeur, droit à une pièce de 15 minutes en 1re partie.
Inspiré du plus long et lent solo Doom possible, Pierre-Luc nous interprète le son que le sang fait quand il glace dans nos veines devant notre pire phobie. Guitare électrique jouée avec archet, bruits d’ambiance sombres tirés d’une promenade en forêt glauque dans tout bon film d’horreur, l’artiste nous fait toute une démonstration de la maîtrise qu’il possède à faire évoluer, progresser le son. Plusieurs solos techniques sont rapides, mais lui veut nous raconter une histoire, nous emmener en voyage, bruit par bruit.
J’aimerais vraiment voir plusieurs cinéastes réaliser un court métrage sur le thème de cette pièce, ce serait un exercice de style absolument pertinent. Belle expérience qui nous met en place pour la suite…
https://www.facebook.com/sullenearth
Growlers Choir
Place aux voix du Growlers Choir. Tous de noir vêtu(e)s et têtes capuchonnées, on se croirait dans le mauvais monastère… Mais dès que les premières notes commencent, on comprend qu’on va passer un moment unique. Simple effet visuel efficace, chaque chanteur(euse) s’éclaire le visage lorsqu’il(elle) participe à l’harmonie, ce qui nous permet de diriger notre attention au bon endroit, même si, la plupart du temps, il y a 13 faces à regarder simultanément !
On a eu droit en spectacle principal qu’à des compositions originales, certaines plus électro, d’autres avec une instrumentation plus classique métal, et souvent un mélange des 2. Lors de la 1re pièce, Growlers creed, une phrase qui les décrit à merveille: « We have stories to tell, and terrors to yell… ».
Plusieurs compositions tournent autour d’un ou une soliste, qui est au centre et plus en mode narrateur de l’histoire, avec ses collègues en support pour mettre l’emphase vocale sur les moments importants de la pièce. Le contraste est savamment exploité, aide à « vivre » la chanson et permet de vivre les émotions voulues beaucoup plus efficacement.
Belle surprise, une pièce en français, « Par la volonté des plis vestibulaires », qui aborde le renouveau, l’effervescence de la vie autour d’un cadavre en putréfaction… Le malheur des uns fait le bonheur des autres. Superbe morceau, débutant de façon bucolique avec chants d’oiseaux et autres bruits de nature, pour finir par « faire du silence tonnerre »…
En finale, la pièce la plus intense, vocalement, musicalement et visuellement, « Hate Machine », est vraiment efficace et reste en tête bien après le spectacle. Leur CD, en vente sur place, est une captation live au 37e Festival International de Musique Actuelle de Victoriaville, en 2021, et la captation est vraiment de haut niveau. En vente au spectacle (et sûrement sur les plateformes du groupe), je vous le conseille fortement. En auto, le retour fut délicieusement mouvementé!
Seul léger bémol, il y avait, durant plusieurs pièces, certains silences prolongés, faisant partie intégrante de l’œuvre. Ces vides ont dupé plusieurs spectateurs qui ont applaudi, pour un peu gâcher la suite du morceau. Il serait sage d’aviser la foule des moments pour le faire avec, par exemple, un éclairage en ce sens et de le préciser au début du spectacle.
Exception faite des 13 chanteurs, il n’y avait aucun instrument sur place, tout était enregistré. Je rêve de les revoir avec un mini-orchestre (ou même un maxi, pourquoi pas..) pour rendre le tout encore plus puissant, plus vivant. Une rumeur court d’un tel spectacle en octobre en grande ville… espérons qu’ils fassent une tournée également, on est preneurs!
J’aimerais vous décrire plus fidèlement ce qu’on a vécu, mais c’est impossible. La voix de ces 13 chanteurs nous emmène partout, nous surprennent par leur puissance et leur registre, avec préférence pour le guttural profond. Exercice qui nous démontre qu’avoir de la voix, ce n’est pas seulement savoir chanter du Céliiine ou du Britney (ce qu’ils se sont permis en rappel, clin d’œil à leur passage remarqué à « America’s Got Talent » en 2021).
Justement, Laurent Bellemare, chanteur et auteur des « Plis vestibulaires », m’a raconté l’aventure: « Ce n’était pas dans notre plan de carrière de participer à cette émission, on nous a approché pour surprendre et offrir quelque chose de différent. De voir toute la machine derrière une telle production fut toute une expérience (qui a fait rager certains membres de la communauté métallique leur reprochant d’avoir succombé au Mainstream), mais beaucoup trop de travail pour notre plan d’avenir et les retombées. » Une telle participation réussit toutefois à faire tomber les barrières, à démystifier le genre auprès des artisans et consommateurs de Pop, en leur montrant que le Rock n’est pas mort, et ses versions extrêmes se portent très bien!
Les pros du CEM ont mis 3 ans de yeux doux pour les convaincre de venir performer ici, et on a eu la chance de faire une captation complète de cette expérience. Si vous avez l’occasion de visionner ceci, ou encore mieux, de les voir lors d’un passage près de chez vous, accourez! Pour ma part, j’ai été conquis par leurs sombres mélodies. L’intensité de sentir toutes ces 13 voix occuper la totalité de l’espace sonore et ce, d’une façon aussi brutale, mais aussi mélodieuse, c’est indescriptible. Ça se vit, et j’ai déjà hâte à la prochaine fois.
Quelques extraits de la soirée avec Growlers Choir (désolé pour le ralenti involontaire vers la fin de la vidéo):
Growlers Choir :
https://www.facebook.com/GrowlersChoirOfficial
https://linktr.ee/growlerschoir
